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004 - Raies Manta : Le Ballet Sous-Marin menacé par le Surtourisme et la Pollution Frédéric Bénot
Nature Épisode 15 janvier 2024 0 J'aime
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Septième opus de cette série : Bifurquons, qui vise à emprunter un nouveau chemin face aux multiples crises parallèles, qu’elles soient économiques, politique, écologique, climatique, sociale, internationale. Nous avons pu observer que les solutions pratiques ne manquent pas mais que ce sont nos décisions, nos comportements, , notre absence de prise en compte du vivant dont nous faisons partie qui sont les problèmes, en raison des modèles politiques, économiques et juridiques qui structurent notre société .
Et au niveau juridique , la question se pose : faut -il donner des Droits à la nature ? donner des droits à l’Océan ? Et le peut-on ? car il s’agit de changer de regard sur le vivant.
Historiquement le droit est issu du droit romain qui visait à gérer la possession ou propriété des objets. D’ailleurs le droit s’est constitué avec d’une part des sujets de droit et des objets de droit. Pour les sujets de droit, ils sont les seuls à détenir une personnalité juridique avec droit propres (droit d’être, de penser, de faire, d’agir en son nom propre…) et des obligations.
Jusqu’à présent, les sujets de droit étaient les humains. Et encore pas tous, les femmes, les enfants et les personnes de couleur n’ont rejoint les sujets de droit que tardivement. L’abolition de l’esclavage et donc les personnes de couleur devenant des sujets de droit aux Etats-Unis date de 1865 seulement.
Et en dehors des humains, les autres sujets de droit sont les personnes morales c’est a dire les entités fictives créées que sont les associations, les entreprises commerciales, les organisations répondant à un statut de personne morale.
Nous avons donc posé des droits propres que sur l’humain et sur ses constructions organisationnelles et collectives. Le reste est objet de droit. Et un objet de droit, tel que la nature, les êtres non humains, les milieux naturels, est susceptible d’être approprié par un sujet de droit. Son propriétaire, selon la législation du pays, peut en faire ce qu’il veut.
Pourquoi les êtres vivants, les espèces et les écosystèmes qui en sont composés ne pourraient pas jouir d’une personnalité et lui reconnaitre des droits propres, et au premier chef, celui d’exister ?
C’est la question posée depuis quelques années par des ONG de protection, des avocats, des politiques. Avec des débuts de mise en œuvre dans quelques pays tels que l’Equateur, la Nouvelle-Zélande, l’équateur et plus près de nous l’Espagne.
Qu’est ce que cela change d’avoir le statut de sujet de droit et d’avoir une personne juridique ? Cela permet, comme ça le permet aux entreprises et à vous par exemple, d’aller en justice, de se défendre, de s’exprimer par l’intermédiaire de porte-paroles, par exemple lors d’un procès. Pour l’instant, si un écosystème ou une espèce sont mis en danger, n’étant pas sujets de droit, aucune action légale tant qu’aucun sujet de droit n’est atteint n’est possible, hormis quelques exceptions à la marge précisément dans les droits de l’environnement qui se créent sous la pression de la société civile par exemple, droits qui restent des petits pas qui sont soit symboliques ou peu appliqués, comme la reconnaissance du préjudice écologique dans des conditions à apprécier.
Est-il réaliste de donner des droits à la nature ?
Tout d’abord, revenons aux bases de notre société : la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789. Alors qu’il y a toujours esclavage dans les colonies, que les femmes n’ont pas les mêmes droits que leur maris, que les enfants sont subordonnés totalement, on a défini les droits naturels de l’homme dont la liberté, et la propriété individuelle. Ce faisant, la protection du collectif ou des communs a été reléguée au second plan, mais également l’ensemble du vivant non humain. Sur ces principes ; compétition et valorisation de l’individu se sont instaurées, au détriment de la protection du collectif, des communs. On y a ajouté comme sujets ayant des droits identiques à des humains les entreprises, constructions juridiques avec des droits propres dont on voit aujourd’hui les dérives. Car les entreprises ne sont pas un collectif qui a pour but la protection de ses membres. Elles réalisent des profits et les répartissent inégalement entre dirigeants, actionnaires, employés avec des écarts de l’ordre de 120 fois entre le PDG d’une multinationale et un employé de base. Cet écart croissant abyssal creusé au fil du temps nous amène aujourd’hui à une transformation de la société qui permet l’accaparement par une petite minorité ni solidaire de ses employés, ni du reste du monde. Ces entreprises ont acquis un tel pouvoir que les rapports de force sont inversés : elles s‘imposent en exploitant les espoirs, mais aussi les ambitions politiques, les vides juridiques, le manque de courage politique, l’absence de régulation économique , et surtout l’absence de suffisante des droits humains et de ceux de nos communs naturels qui a permis une exploitation à outrance de l’environnement , un environnement qui comprend la lithosphère mais aussi l’ensemble du vivant non humain . Résultat : nous sommes aujourd‘hui, maintenant en train de compromettre la vie sur terre.
Si on s’accorde sur l’idée que les humains font partie de la communauté du vivant, et que celle-ci ne soit pas plus exploitée au profit de quelques-uns, mais qu’elle devienne le foyer commun dans lequel nous pourrons vivre, nous devons changer de modèles : ni capitalisme, ni communisme, ni fascisme ou régime autoritaire… qui ne sont pas des fatalités. Il y a d’autres modèles à mettre en place et nous en avons l’intelligence. Pour cela il faut modifier en profondeur l’expression du pouvoir, en mettant la pollution, un terme à l’exploitation, l’extraction, en garantissant des droits aux laisser pour compte : l’ensemble du vivant non humain.
Est-ce facile ? Non, c’est un basculement historique. La modification du droit de l’environnement actuel est nécessaire mais ne suffira pas. Un statut juridique pour le vivant est une des solutions pour la pérennité de vie aquatique et terrestre.
Une nouvelle révolution doit avoir lieu : nous ne sommes plus au-dessus du vivant, mais au sein de la communauté du vivant. Nous ne sommes pas « maitres et possesseurs de la nature » n’en déplaise à Descartes.
Réconcilier l’humain et le vivant, l’humain et notre planète, l’humain avec lui-même, va nous demander l’effort suivant : que les modèles et systèmes politiques, économiques et juridiques fassent la promotion des comportements qui contribuent au bien être de la communauté du vivant, humains et non humains. C’est à ce prix qu’est notre survie.
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Monde Marin
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